A
quelques jours du débat sur l'immigration, plus d'une vingtaine
d'associations adressent une lettre ouverte aux parlementaires…
News letter du Diocèse de
TOURS 1er
OCT 2019
Mesdames,
Messieurs les député(e)s,
Mesdames,
Messieurs les sénateurs(rices),
A
la veille du débat annoncé au Parlement sur l’immigration, les
associations de solidarité et les collectifs citoyens s’inquiètent
de la multiplication des contrevérités et postures démagogiques
dans l’espace public, loin des réalités vécues par les personnes
réfugiées ou exilées et des associations qui les accompagnent au
quotidien. Pour certains, la France serait « trop généreuse » et
« attractive » dans ses procédures d’accueil : la réalité est
pourtant tout autre.
Le
droit d’asile est aujourd’hui malmené par une nette dégradation
des conditions d’accueil et d’accompagnement des demandeur(euse)s
d’asile du fait d’un sous dimensionnement chronique du parc
d’hébergement (CADA et HUDA) pourtant dédié à ce public. Le
ministère de l’intérieur chargé de cette politique admet
lui-même qu’un(e) demandeur(euse)s d’asile sur deux, soit près
de 100 000 personnes, n’accède pas à un hébergement et à un
accompagnement dans le dispositif national d’accueil faute de place
disponible. A cette situation déjà dramatique, s’ajoute le
durcissement des conditions d’entrée dans l’hébergement des
personnes sans-abri dénoncé par certaines associations signataires
: instruction de l’État demandant aux associations de trier les
personnes et familles sans-abri en fonction de leur statut
administratif, circulaire demandant au 115 de ficher les
demandeur•euse•s d’asile et les réfugié•e•s hébergé•e•s
en vue d’une transmission au ministère de l’intérieur sans se
soucier du consentement des personnes...
Cette
politique de durcissement de l’accueil, qui viole le principe légal
d’accueil inconditionnel dans l’hébergement d’urgence n’a eu
pour seul résultat que l’augmentation inquiétante du nombre de
sans-abri – souvent des familles avec enfants – et la
multiplication des campements indignes et des squats dans les
métropoles (2600 personnes à Paris, 2000 personnes à Nantes et son
agglomération, 2000 personnes à Toulouse, 1500 personnes à
Bordeaux, 400 personnes à Rennes…). Parmi ces personnes se
trouvent de nombreuses femmes, seules ou avec enfants, qui ont toutes
été exposées à des violences ou à l’exploitation, notamment
sexuelle, dans leur parcours migratoire. La précarisation des
étrangers touche également les ménages qui obtiennent l’asile :
15 à 20 % des personnes présentes dans les campements parisiens
sont des réfugiés statutaires. Devant cette crise humanitaire, 13
maires de grandes villes de toutes sensibilités politiques ont écrit
aux ministres de l’intérieur et du logement le 24 avril dernier
pour alerter sur cette situation et demander une intervention
d’urgence de l’État. Pour ces élus, « Nous ne pouvons accepter
plus longtemps cette situation indigne de nos valeurs et de la
tradition humaniste de notre pays ». Une démarche restée sans
réponse à ce jour, comme les nombreuses alertes associatives
adressées au gouvernement depuis plusieurs mois.
Comme
si l’extrême précarité liée à l’errance ne suffisait pas, l’
OFII a décidé sans concertation avec le secteur associatif et en
plein mois de juillet, d’interdire le retrait au distributeur de
l’allocation ADA (6,80 euros par jour pour une personne seule),
seule ressource disponible pour les demandeur(euse)s d’asile qui ne
sont pas autorisé(e)s à travailler. Les ménages concernés, soit
environ 151 000 personnes, seront donc sommés à partir du 5
novembre prochain de faire leur course avec une carte de paiement
sans monnaie, à charge aux associations de trouver des solutions
pour compenser ces difficultés nouvelles. Et on peut redouter une
diminution de l’ ADA pour certaines catégories de demandeur(euse)s
d’asile qui augmenterait mécaniquement l’intensité de la
pauvreté de cette population dont les conditions de vie sont déjà
très précaires.
L’accès
aux soins est également remis en cause par la menace d’une
restriction de l’accès des étrangers précaires à l’Aide
Médicale d’État ( AME ) et à la CMU -C et la réduction du
panier de soins. Après l’accueil inconditionnel dans
l’hébergement, c’est donc le droit de toute personne malade
présente sur le territoire à être soignée, l’un des piliers de
notre protection sociale, qui est attaqué en utilisant parfois les
arguments les plus démagogiques (l’abus de soins esthétiques
évidement non couverts par l’AME). Les associations ainsi que de
nombreux(ses) professionnel(le)s du soin ont largement alerté sur
les dangers de ces remises en cause pour la santé des plus précaires
et les impacts majeurs en termes de santé publique pour l’ensemble
de la population.
Face
au débat qui s’engage, nous souhaitons rappeler que l’accueil et
la solidarité envers les étrangers sont une réalité à laquelle
contribuent de très nombreux citoyens, toutes classes sociales
confondues, dans les villes comme dans les zones rurales, et que leur
engagement est exemplaire et sauve l’honneur de la République.
Nous rappelons que la France bénéficie largement de l’arrivée
des personnes étrangères, notamment pour répondre aux besoins de
main-d’œuvre non pourvus, qui se chiffrent par dizaines de
milliers, pour les entreprises qui peinent à recruter.
Nous
demandons aux parlementaires de s’emparer de ses réalités de
terrain pour formuler des propositions qui garantissent le respect
des droits fondamentaux de toutes les personnes en situation de
précarité présentes sur le territoire national. Cela suppose des
mesures volontaristes de création de places d’hébergement de
qualité et de production de logements accessibles sur l’ensemble
du territoire afin que personne ne soit contraint de vivre à la rue
et que les pouvoirs publics puissent enfin engager, aux côtés des
associations, un programme de résorption des campements indignes qui
font honte à la République.
Nous
demandons également que la représentation nationale réaffirme le
principe d’accès inconditionnel aux soins des populations
précaires, sans distinction de nationalité ou de situation
administrative.
Nous
proposons également que soit débattue la possibilité d’accorder
un titre de séjour des personnes et des familles présentes dans
l’hébergement parfois depuis des années, afin de leur permettre
l’accès à l’emploi et au logement. Une telle mesure permettrait
de répondre avec pragmatisme à la situation de ces personnes et
familles qui ne sont pas « expulsables » mais que l’on maintient
dans une précarité indigne humainement et coûteuse pour le pays,
au lieu de leur donner les moyens de s’intégrer par le travail. Il
en va de même pour les personnes, en particulier les femmes,
victimes de violences ou de la traite humaine en France ou pendant
leur parcours d’exil.
Nous
soutenons enfin la nécessité d’une politique d’intégration
plus ambitieuse, qui généralise l’accès aux cours de français
pour les primo-arrivants, ouvre le droit au travail des
demandeur(euse)s d’asile et accélère l’accès au logement des
personnes à la rue, en particulier les réfugié(e)s.
L’examen
de ces propositions permettrait de sortir par le haut d’un débat
aujourd’hui mal engagé, dans le respect des droits fondamentaux et
des besoins élémentaires des personnes et des familles que les
associations et les collectifs citoyens accompagnent au quotidien.
Nous
vous prions d’agréer l’expression de notre considération la
plus distinguée.
ASSOCIATIONS ET ORGANISMES SIGNATAIRES :
Fédération des acteurs de la solidarité ,Fondation Abbé Pierre Fondation,Armée du SalutFrance Terre d’Asile,La Cimade,Emmaüs Solidarité,Emmaüs France,Collectif les morts de la rue
Uniopss,Médecins du Monde,Secours Catholique-Caritas France,Association des Cités du Secours Catholique,Samusocial de Paris,Ligue des droits de l’Homme,Fédération Santé Habitat
SOLIHA Advocacy France,Association Nationale des Compagnons Bâtisseurs
Fédération Entraide Protestante,Association DALO,Centre d’Action Sociale Protestant,UNHAJ,UNAFO
CONTACT : Brigitte Bécard Tél. 06 84 22 37 09
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